L'image du lait en poudre
Rédigé par Métro-Boulot-Catho -J'ai entendu un jour un prêtre comparer la Bible à du lait en poudre.
De même, disait-il, que l'on met le lait sous forme de poudre pour le conserver, mais qu'on ne le consomme pas sous cette forme, de même on a mis la parole de Dieu sous une forme écrite pour la conserver, mais ce n'est pas sous cette forme qu'il faut la "consommer". C'était pour expliquer ce que c'est que la proclamation (car vous n'êtes pas sans savoir que la Bible, au cours de la Messe, est proclamée ; on n'a jamais entendu un prêtre dire à l'assemblée : "bon, mes enfants, prenez vos livres à la page tant, et lisez de là à là ; je vous explique quand vous aurez fini").
Je retiens cette image pour répondre à la question de l'application de l'analyse critique à la Bible.
Du lait en poudre, qu'est-ce que c'est ? du lait ?... ou de la poudre ?...
On ne consomme pas le lait sous la forme de la poudre ; il faut autre chose : l'eau, pour reconstituer le lait. De la même façon, pour la Bible, il faut autre chose que le seul texte pour retrouver la Parole de Dieu ; cet autre chose, c'est l'Esprit-Saint.
Imaginons un scientifique, un scientifique en blouse blanche et qui ne jurerait que par la Science. S'il tombait un jour sur une poudre blanche dont il ignorerait la nature exacte, que ferait-il ? Il l'examinerait au microscope, et il verrait des atomes de calcium, de vitamines diverses, et de tout ce qu'il y a dans le lait (bon, ça va, j'ai pas fait bio-chimie, moi !) ; tout, sauf de l'eau. Or il sait que dans le lait, il y a de l'eau. Que croyez-vous qu'il en concluerait (et le plus logiquement, le plus rationnellement, et le plus scientifiquement du monde en plus) ?
"ceci n'est pas du lait"
Et parce qu'il aurait raison, il serait incapable de comprendre celui qui, entrant dans la pièce à ce moment-là, lui dirait (parce que lui aurait découvert qu'en mettant de l'eau sur la poudre, on en fait du lait) : "mais si, c'est du lait".
L'historien est un scientifique dont le microscope a pour noms "critique interne", "critique externe", "archéologie", etc... ; ces méthodes rigoureuses lui permettent d'observer la "poudre" qu'il a sous les yeux, et d'en analyser la composition de façon précise. Il peut parfaitement soumettre la Bible à son microscope. Mais... il n'y verra que de la poudre. Que des mots, aucun message...
En face le croyant, qui, lui, y a reconnu du lait, aura bien de la peine à lui faire comprendre que cette poudre est autre chose que de la poudre.
L'historien se dira que le croyant est décidément bien crédule d'appeler "ça" du lait ; le croyant se dira que l'historien est décidément bien orgueilleux, et bien borné, de s'accrocher à son microscope ; et chacun repartira chez lui convaincu d'avoir croisé un parfait imbécile.
Le pire, c'est que l'un et l'autre ayant raison (chacun de son point de vue), il leur sera impossible de comprendre d'où vient leur différent. Et que beaucoup de gens sont convaincus qu'on ne peut pas concilier la Foi et l'étude scientifique de la Bible...
D'où l'intérêt d'être historien ET croyant !