L'histoire d'Arthur, ou : le Paradis est-il réservé aux seuls baptisés ?

Rédigé par Métro-Boulot-Catho -

Question à trois caramels mous :
dans l'hypothèse où le Paradis existe, est-il réservé aux baptisés, ou bien aux croyants, ou bien aux "gens biens" ? et tous les autres, alors, ils vont en enfer ?

 

Vous connaissez Arthur ?

Oui, bien sûr : Arthur, c'est votre super ami, le copain d'enfance, celui à côté duquel vous avez usé vos fonds de culotte sur les bancs de la Communale, avec lequel vous avez fait les 400 coups, l'école buissonière à l'occasion, celui qui a partagé tous vos secrets pendant vos vertes années, les profs, les filles, les vacances, les parents, bref : un quasi frère.

Oui, mais voilà : les années ont passé, vous avez fait des études différentes, vous avez déménagé ; vous vous êtes mariés, les enfants sont arrivés et avec eux, d'autres soucis ; votre carrière a été bien remplie, le temps vous a manqué, tout ça : il y a bien longtemps que vous n'avez plus vu Arthur, et même depuis quelques temps vous n'échangez plus vos voeux (mais vous ne savez plus très bien qui a oublié le premier). Mais quand même, le souvenir reste, c'était un chouette copain.

Or, dans quelques mois, c'est votre anniversaire. Ou votre départ à la retraite, ce que vous voulez, mais une occasion que vous décidez de marquer, en faisant une grande fête avec tous vos amis. L'occasion ou jamais de revoir Arthur. Vous envoyez donc un carton d'invitation à sa dernière adresse connue.

Les invités commencent à répondre : les uns viendront, les autres sont vraiment désolés ; mais pas de nouvelles d'Arthur.

Vous vous dites qu'il n'a peut-être pas reçu votre carton. Alors, vous appelez sur son numéro, parce que vous avez vraiment envie de le revoir. Vous tombez sur son répondeur (au moins, c'est bien son numéro), vous laissez un message, et vous attendez.

Quelques temps plus tard, le traiteur est réservé, le gâteau est commandé ; votre femme s'occupe de la déco, vos enfants et quelques très bons amis peaufinent leurs discours ; mais toujours pas de nouvelles d'Arthur. Vous avez déjà laissé deux messages sur son répondeur, et sa boîte aux lettres électronique est saturée. Vous vous dites que c'est quand même trop bête, alors vous demandez à un autre ami qui n'habite pas très loin (de chez Arthur) de passer chez lui. Cet ami vous répond qu'il n'y avait personne, et les volets étaient fermés. Des voisins lui ont dit que ça faisait déjà un moment qu'ils ne le voient plus, et le facteur commence à avoir du mal à glisser les lettres sous la porte.

Bref, Arthur est introuvable.

Seulement, le temps passe, et la fête approche : vous vous résignez donc à ne pas revoir Arthur.

Le jour J arrive : la fête commence, les premiers invités sont là depuis un moment déjà, tout bien sapés en votre honneur, et l'ambiance est en train de prendre. Tout à coup : coup de sonnette. Vous allez ouvrir et là, vous voyez, dans l'ordre : une barbe de six mois, un collier de fleurs et un ukulélé en bandoulière ; derrière tout ça, Arthur en chemise bariolée, short orange et tongs bleu turquoise.

Avant que vous soyez revenu de votre surprise, Arthur vous dit très vite :
"Ah, écoute, j'étais à Tahiti ces derniers mois" [vous aviez déjà compris qu'il ne revenait pas du Groenland, mais passons], "je viens d'atterir à Roissy, j'arrive chez moi et je tombe sur tes messages, j'ai sauté dans le taxi sans prendre le temps de me changer, en me disant qu'il n'était peut-être pas trop tard, est-ce que je peux entrer ?"

Que faites-vous ?

  • Vous le renvoyez chez lui, parce que 1) il n'a pas renvoyé sa réponse à temps, 2) il est habillé comme un plouc, 3) il n'a même pas de cadeau pour vous, et 4) il débarque en plein milieu de la fête comme un cheveu dans la soupe...

  • Ou bien ça vous fait super plaisir de le revoir, alors tant pis pour la réponse, tant pis pour la tenue, tant pis pour le cadeau, tant pis pour tout ça, l'important c'est qu'il soit là, "sacré Arthur, mais entre donc !"...

... ...

La Bonne Nouvelle de l'Eglise, c'est que Dieu préside à une grande fête, autour de Lui. Et qu'Il y convie TOUS les hommes. Certains ont déjà ouvert leur invitation, et y ont répondu. Le baptême n'est pas la condition de l'entrée au Paradis : il est la réponse de l'homme, à l'invitation de Dieu. Plus exactement, il est la possibilité donnée par Dieu à l'homme de lui répondre dès aujourd'hui.

Et puis il y a des hommes qui, aujourd'hui, sont loin de "tout ça". Pour des raisons qui leur sont propres, ils sont partis au bout du monde, loin de Dieu. Et Dieu tente, inlassablement, de les joindre. Sans y arriver toujours : après tout, si vous ne croyez pas en Dieu, c'est aussi parce que Lui ne s'est pas fait comprendre de vous.

Mais qu'importe ? je crois qu'un jour, tous les hommes finissent par découvrir à quelle fête ils sont invités. Et ce jour là, d'où qu'ils viennent, Dieu les accueille avec une grande claque dans le dos.

Notez bien que ce n'est pas moi qui ait inventé l'histoire d'Arthur. Jésus la raconte dans l'Evangile. Si si : l'histoire d'un fils, qui s'était éloigné de son père, et que ce dernier a accueilli à bras ouverts : si ça ne vous rappelle rien du tout, consultez Lc XV, 11-32. Je n'ai fait que l'adapter un peu.

Mais il reste encore une question : si l'on est accueilli même au dernier moment, à quoi ça sert donc de s'embêter à recevoir le baptême, d'aller à la messe, de se confesser, de se plier à certaines règles ? C'est bien la réaction du fils aîné, dans la parabole du fils prodigue : "tout ce temps je suis resté avec toi, j'ai toujours obéi, je n'ai rien réclamé pour moi, et ce gros naze qui a dilapidé ton bien en menant la grande vie, tu lui fais fête ?".

Ce sera l'objet d'une prochaine réflexion. Celle-là est déjà bien assez longue.

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